jeudi 12 juin 2008


ANNIE DUBET, chorégraphe

Dans mes rêves, le désir de partager ma danse, de contribuer à creuser le travail sur le corps afin de traduire une nécessité intérieure, un élan vital :


Créer, inventer, chercher, composer son langage propre, transmettre une passion.


Deux grands axes de réflexion alimentent sa recherche. D’une part, un travail sur le corps s’appuyant à la fois sur les codes de la danse contemporaine et sur des principes acrobatiques, lui permet de favoriser l’émergence d’un nouveau matériau ou ces deux modes d’expression se rejoindraient, se fondraient pour en former un nouveau. D’autre part, la volonté affirmée de développer une relation forte à son public conduit Annie Dubet à montrer la danse dans des lieux parfois inattendus. Ses derniers spectacles se jouent aussi bien en intérieur qu’en extérieur – rues, places, jardins publics, espaces urbains ou ruraux – et son écriture chorégraphique s’adapte à cet environnement polymorphe.




DE MON CHEMINENENT PERSONNEL





Depuis quelques années domine l’impression d’une société qui se défait, d’une crise du lien social : l’autre fait peur, il est parfois devenu inaccessible…

Mon expérience sur le terrain auprès d’adultes et d’enfants de toutes conditions m’a permis de constater l’existence de difficultés de plus en plus importantes dans la construction de l’identité des individus et de ruptures dans la relation avec l’autre et le monde extérieur.

Agressivité, énergie incontrôlée, tensions permanentes, absence d’estime de soi sont des indicateurs de faille dans la construction de l’identité et expriment très souvent une grande souffrance. J’observe dans le même temps une grande force expressive, une capacité d’imagination et d’émotion qui ne demandent qu’à prendre place.

Annie Dubet


A MA CREATION "LA PALCE DE L'AUTRE"


« Découvrir l’expression de l’autre n’est psychologiquement possible que si l’autre a une chance de rencontrer la mienne »

Maxime Apostolo (directeur de Pulsart)


"La reconnaissance de l’autre est nécessaire à notre construction identitaire. L’évolution sociale et culturelle que nous sommes en train de vivre m’amène à m’interroger sur la question du lien ou de l’absence de lien social."


"Quelle forme de dialogue faut-il inventer avec autrui pour progresser ensemble vers de nouveaux liens ?"


La relation à l’autre est le fil d’Ariane de mon travail de recherche. Cette création propose de suivre les méandres des comportements des huit personnages danseurs et musiciens.


"Comment vont-ils combiner leurs énergies plutôt que de les confronter ?"


Parfois à la dérive, en quête d’identité, ils dépassent, surpassent, passent par-dessus, et donc s’élèvent pour échapper à l’étouffement à l’enlisement.
Tout au long de la pièce, les personnages développent une force de vie singulière. Dans le même temps, la capacité de chacun à s’aimer davantage et à aimer l’autre est croissante.

Annie Dubet

mardi 3 juin 2008

MA DEMARCHE CHOREGRAPHIQUE

"Ma recherche personnelle porte essentiellement sur l'émotion née du lien. LA PLACE DE L'AUTRE, vue sous l'angle sociologique, se transpose directement dans mon travail de recherche et d'improvisation avec les danseurs et les musiciens".

"Laisser la place à l'expression de chacun, à son originalité. La gestuelle singulière du danseur ou de l'acrobate se mélange sans artifice, s'échange, interroge, bouscule ou au contraire TRANS - PORTE ".






"Le mouvement va se créer dans l'instant, dans la zone de possibles. L'inconnu est accueilli, il n'y a pas de certitude, chacun a le droit d'oser."

"Je privilégie l'émotion qui se dégage du corps dans un dépouillement choisi de tout ce qui est extérieur."

"Je ne m'inscris pas sur un axe narratif, mais dans un processus où le sens va se construire petit à petit : les étapes de recherche avec le groupe (danseurs, musiciens, éclairagiste, scénographe) me permettent d'extraire des matériaux que je vais ordonner comme des strates en archéologie ou combiner pour élaborer ma trame dramatique."

"Le mouvement visité par l'imaginaire de chaque danseur donne un matériau différent, une forme différente. Mon rôle de catalyseur est de permettre à ce matériau d'exister dans les zones choisies."

"Ensuite je le retravaille comme une pâte à modeler pour finaliser la pièce : composer, recomposer, chercher le mouvement juste. Plus le corps est malléable, capable de réagir rapidement, plus la conscience de l'autre est aiguisée, plus l'exploration de l'inconnu dévoile sa richesse."

Annie Dubet, chorégraphe

LA RECONNAISSANCE DE SOI, DE L'AUTRE




Le regard de chacun porté sur l'autre doit se remplir de générosité, d'écoute, d'attention. C'est la condition essentielle du développement de chacun : regard jeunes – vieux, bien portants - handicapés, nouveaux arrivants - anciens…C'est justement cette différence qui comble la part manquante du moi.

Sans oublier l'exclusion

Je parle de ceux qui n'ont pas eu la chance d'être affiliés. L'autre devient celui dont nous devons nous méfier. Rejet, indifférence, méfiance, se faire bousculer par un regard qui menace : un regard qui ne nous aime pas ou plus.


Inventer des passerelles entre le " JE " et le "NOUS"


Ou affirmer sa propre existence et communiquer avec autrui grâce à un langage approprié. Faire des allers-retours entre la connaissance de soi et celle de l'autre.

La danse nous met émotionnellement en mouvement et nous permet une autre perception d’un monde parfois à la dérive. Au delà de l'effet esthétique, technique ou artistique, je suis à la recherche de zones de rencontres où ces allers-retours sont possibles : passer de l'attache fixe qui étouffe à un voyage de l'inattendu dans la recherche de l'altérité.


"La recherche que je mène dans ma danse par rapport à l'envol éphémère du porté se traduit par la recherche d'un " abandon actif dans l'air " de la part du danseur : un réglage minutieux de l'énergie, de l'instant exact, un réajustement parfait de ses repères". Annie Dubet

INVENTER DE NOUVEAUX LIENS


Le lien unique des sociétés communautaires dites hostiles peut être remplacé dans les sociétés individualistes contemporaines par d'autres liens, dont certains restent d’ailleurs à inventer.

Les sociologues, tel François de Singly, me confortent dans l'idée de l'émergence d'un nouveau paradigme, dans la nécessité d'inventer de nouveaux liens.

L'essentiel repose sur notre aptitude à soutenir chacun d'entre nous dans sa capacité optimale à se développer, à grandir, en un mot, à exprimer son individualité.



Favoriser la complémentarité des talents et des compétences


plutôt que laisser place à la compétition et à la performance démonstrative.

lundi 2 juin 2008

DES RACINES ET DES AILES

J'imagine l'espace scénique comme un espace symbolique où la mémoire organique de chacun peut se partager sans discrimination, où les tensions peuvent s'exprimer avec maîtrise.

Une libre circulation dans une zone délimitée dans laquelle il est permis d'entrer et sortir.

Pour parvenir à son autonomie, son indépendance, chaque individu doit avoir la liberté de choisir de s'inscrire dans tel ou tel groupe.

Il doit pouvoir également le quitter pour aller dans un autre.

C'est ce que le sociologue François de Singly appelle


la " désaffiliation volontaire "


Nous pouvons rêver, traverser des moments d'ivresse, de folie, de complicité, de révolte, d'amour, de tendresse…
Les repères de chacun peuvent changer et se modifier. Le réajustement permanent des énergies permet à chacun de devenir flexible, malléable, disponible, prêt à…

Ce réglage d'horlogerie permet l'affirmation d'un soi indépendant et autonome.

DEFINIR UN ESPACE DE LIBERTE


Cela signifie vivre ensemble le mieux possible pour laisser la place à la réussite de chaque individu.
La liberté sociale nécessite de respecter la loi qui protège, qui apporte la sécurité pour vivre ensemble.

Dans la danse, le respect des règles s'applique également :

rigueur du placement, respect du corps au sens anatomique du terme, respect de l'espace des autres…

Ensuite, seulement la liberté est offerte à chaque danseur par " le rôle approprié " pour son interprétation personnelle.

L'espace de liberté est alors ouvert : à chacun de s'approprier le mouvement.

En tant que chorégraphe, c'est à moi qu'il incombe de définir le cadre. C’est seulement ensuite que toute la richesse des possibles est à inventer.



" Repoussez l'impossible, faites de votre vie un voyage de l'inattendu "

Bernard Giraudeau

LA MUSIQUE

Nous avons choisi de nous appuyer en référence sur la structure de la symphonie :

L'articulation multiple du discours musical s'inscrit dans des plans sonores individualisés de façon variable grâce aux différents instruments :

4 MUSICIENS


Les musiciens occupent l'espace scénique avec les danseurs ; ce ne sont pas deux mondes juxtaposés. Je souhaite que chaque musicien trouve sa place dans la mise en scène.


Violoncelle, alto, accordéon, guitare


Mon choix pour ces quatre instruments est lié à ce qui se dégage du musicien qui les anime et à l’expression possible que je ressens par rapport à ma danse.

Les quatre musiciens jouent régulièrement ensemble en duo ou trio alternativement. Je leur propose de travailler en quatuor pour la création.